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Clause earn out : Stratégie clé en négociation de cession d'entreprise

 

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Dans quels cas convient-il d’utiliser une clause d’earn-out ?

 

La clause d’earn out est une disposition juridique souvent utilisée dans les contrats d’acquisition d’entreprise. Elle stipule que le vendeur recevra des paiements supplémentaires basés sur les performances futures de l’entreprise vendue. Une partie du prix d’achat est différée et conditionnée à la réalisation de certains objectifs convenus entre les parties. En termes juridiques, cette clause de complément de prix vise à aligner les intérêts des parties et à garantir une transition en douceur.

 

Dans un contrat de cession des titres d’une société, elle suppose que le montant comporte un prix « plancher » et un supplément pour le vendeur. Ce « bonus » est généralement versé au cédant qu’en cas de réalisation de conditions postérieures à la cession.

 

Par ailleurs, cette prime de performance illustre l’une des problématiques majeures d’une opération de cession, à savoir déterminer un prix de l’entreprise cédée. En effet, bien que sa valeur repose en partie sur des éléments objectifs (actif net, valeur de rendement, comparable, cash-flow…), des éléments subjectifs sont à prendre en compte. Or l’acquéreur ne peut pas toujours les maîtriser. La clause va alors permettre de réduire les imprévus liés à cette part subjective.  
Il convient de ne pas confondre la clause d’earn-out avec la clause de révision. Dans cette dernière, le total peut être revu soit à la hausse soit à la baisse. Il n’existe pas de somme ferme et définitive. Le dispositif de révision comporte donc un risque postérieur à la cession pour les deux parties. En fonction des situations, cette rémunération conditionnelle peut se révéler très opportune, car elle présente de nombreux avantages. Ci-après 7 cas d’utilisation favorables.

 

 

Cas 1 : Recourir à une clause earn-out pour réguler le prix

 

L’un des cas les plus fréquents de recours à la clause d’earn out est lorsqu’une différence notable existe entre la somme attendue par le cédant et l’offre du repreneur.

 

Les parties ont des intérêts contradictoires dans une cession d’entreprise. 
D’un côté, le cédant souhaite naturellement vendre son entreprise au prix le plus élevé. En effet, il s’est fortement investi dans sa création. Ce sentiment d’implication conséquente peut alors l’amener à considérablement surévaluer le coût de cession. 

 

De l’autre côté, le cessionnaire aimerait l’acquérir au coût le plus bas, du moins à sa juste valeur. La plupart du temps, ce dernier ne travaillait pas dans l’organisation. Il ne se rend donc pas compte du potentiel de l’entreprise cible. De ce fait, il peut sous-évaluer le coût de cession.

 

Dans cette situation, avoir recours au gain différé est une bonne solution pour concilier les intérêts. Comment ? En subordonnant une partie du coût de cession aux bilans futurs de l’entreprise. 

 

Le vendeur cédera la cible à un coût plus important si les bilans de l’entreprise sont ceux qu’il espérait. Dans le cas contraire, l’acquéreur achètera l’entreprise à un prix moindre. Ou bien le total est fixé selon l’historique de la structure et non sur ses perspectives. 

 

Dans le premier cas, le cédant risque de vendre son entreprise à un coût moindre en cas de bilans inférieurs à ceux espérés. De même, le repreneur pourrait acheter plus cher l’entreprise si elle devient plus performante suite à son acquisition.

 

Dans cette négociation, la difficulté réside dans le fait d’identifier l’indicateur pertinent pour mesurer les performances de l’entreprise. Chiffre d’affaires, marge brute, résultat d’exploitation… ? La mise en place d’une telle clause permet alors de protéger les intérêts des deux partis.

 


 

Cas 2 : Protéger les relations avec les partenaires de l’entreprise cédée

 

La clause d’earn out a également vocation à être utilisée quand l’activité de la firme est liée à un fort intuitu personae. En effet, la personne du dirigeant peut être très importante dans certains domaines, notamment en cas d’activité de prestations de services ou de conseils. Ou lorsque le dirigeant cédant est le fondateur. 

 

Dans des entreprises de type TPE/PME, les fournisseurs ou les clients sont souvent fidèles à la structure pour la relation de confiance qui s’est établie. Un changement de dirigeant peut alors parfois entraîner la perte d’une partie de ces acteurs.   

 

Utiliser la clause peut également aider à sécuriser l’accompagnement du vendeur. Le cédant sera motivé (de manière financière) pour présenter au mieux l’acquéreur à ses partenaires. Il mettra à profit la période d’accompagnement pour nouer des relations.  

 

Le maintien de l’intuitu personae et la nécessité de conserver le poste clients après la cession est d’autant plus vital si le portefeuille clients de la société est déséquilibré. En effet, certaines entreprises réalisent la majorité de leur résultat grâce à un ou quelques clients.

 

Bien que la loi prévoit une protection des entreprises en cas de rupture brutale de relations commerciales, il est préférable de limiter une baisse de valeur (induite par la perte de chiffre d’affaires). Les parties devraient se mettre d’accord sur les modalités de calcul par voie contractuelle au moment de la cession.

 

Afin d’être indemnisée, cette rupture spontanée doit être constatée par un tribunal. Souvent la procédure est longue. Cela, sans compter qu’il existe toujours un aléa judiciaire. 

 

Le mécanisme de la clause de complément de prix présente un avantage pour cadrer un tel imprévu. Il prévoit une décote sur le paiement si la relation avec les clients importants n’est pas pérennisée. La rémunération conditionnelle permet alors de s’assurer de la stabilité d’un actif.

 

Le départ du dirigeant mène parfois à des départs de personnes clefs de l’entreprise. En effet, l’arrivée d’un nouveau chef d’entreprise dans la structure modifie le management global. Or, ce changement ne convient pas toujours à tous les salariés. 

 

Dans ce contexte, la clause facilite la transition au sein de l’organisation. Grâce à l’accompagnement du cédant, le repreneur pourra apprécier la manière dont le personnel est géré. Il apprend également à travailler avec eux, aux côtés de l’ancien dirigeant.

 

 

 

Cas 3 : Rester prudent face à l’environnement économique

 

L’organisation cédée est parfois une pionnière dans son domaine d’activité. La concurrence semble absente à court terme. Cependant, dès lors que son activité sera reconnue viable, nous pourrions constater le développement de concurrents. Ce qui pourra provoquer une diminution des bénéfices. 

 

De ce fait, il est recommandé que le cessionnaire maîtrise le marché ainsi que l’activité dans laquelle il investit. Pour cela une étude de marché est nécessaire. L’acquéreur devra être en mesure d’identifier la concurrence et évaluer son évolution. Cette démarche doit également s’appliquer à la clientèle. 

 

Dans cet exemple, la clause d’earn out est un avantage. Elle évite de considérer le potentiel de croissance comme acquis lors de la fixation du coût de cession. L’acquéreur prendra le pari de la création de valeur avec le vendeur.

 

De même, le chiffre d’affaires peut stagner ou baisser. Ce cas se présente parfois pour d’anciennes organisations qui sont en passe d’atteindre un point d’inflexion dans leur développement. Le mécanisme de compensation évitera alors de surpayer l’entreprise en cas de décroissement de l’activité et de conditionner le complément de prix à une stabilité de l’activité.

 

Enfin, pour les start-up ou entreprises en difficulté, la question de la valorisation se pose souvent. S’agissant du premier type de structure, d’importants investissements ont été effectués. La start-up se trouve ainsi en perte depuis le début de son activité. Quant aux autres entreprises, des efforts sont en cours de réalisation afin de redresser l’activité de la société. 

 

Dans les deux cas, la valeur purement comptable de la firme est très faible, voire inexistante. Seules les perspectives de rendement futur peuvent servir de base à une détermination de la valeur d’entreprise. Là encore, le paiement différé selon les résultats futurs devient utile.

 

 

Cas 4 : Négocier grâce à la clause earn-out

 

Le recours à l’earn-out peut aider à finaliser une vente en solutionnant des points qui paraissaient bloquants. 

 

Par exemple, lorsque l’acquéreur ne dispose pas de l’intégralité des fonds. Il ne peut payer immédiatement le coût de cession. Les partis peuvent alors décider que seule une partie du prix sera réglée au moment de la cession. Le solde fait alors l’objet d’un complément de prix rehaussé par rapport au montant normal. La clause permet ainsi au cessionnaire de payer le cédant avec la trésorerie future de la structure. Elle s’apparente ici à un crédit vendeur.  

 

Toutefois, il convient d’éviter que le paiement de ce complément absorbe la totalité de la trésorerie de l’entreprise cédée. Cela mettrait l’activité en péril. 
Utiliser la clause est judicieux lorsque le cédant limite fortement la garantie d’actif et de passif qu’il est prêt à accorder. Ou encore, lorsque le cessionnaire n’a pas conduit des audits approfondis avant l’acquisition.  

 

Si l’acquéreur estime que la garantie ou le résultat des audits sont insuffisants, la clause lui permettra de moins investir au moment de la cession. Les parties prévoiront alors un complément de prix conditionné. Par exemple à l’absence de révélation de passif dont l’origine serait antérieure au jour de la cession et qui sera payé uniquement à la fin d’une période de référence déterminée.


 

 

Cas 5 : Motiver les propriétaires vendeurs

 

La vente d’une entreprise peut susciter diverses inquiétudes chez les vendeurs, notamment la peur de perdre le contrôle et l’attachement émotionnel à leur création. Pour réduire ces préoccupations, la clause earn-out offre une solution incitative en offrant aux cédants la perspective de gains basés sur la création de valeur future de l’entreprise.

 

Fonctionnant comme un mécanisme incitatif, ce dispositif lie une partie du prix de vente à des objectifs de performance convenus, tels que le chiffre d’affaires, les bénéfices ou la croissance de l’entreprise après la cession. Atteindre ces objectifs permet aux vendeurs de bénéficier de paiements supplémentaires, les incitant ainsi à rester impliqués dans l’entreprise et à travailler pour maximiser sa valeur.

 

Cette incitation est particulièrement pertinente lorsque les compétences ou les connaissances des vendeurs sont essentielles à la réussite future de l’entreprise. Leur implication post-vente facilite une cession en douceur et maintient la continuité des opérations, rassurant les employés, les clients et les partenaires commerciaux quant à la stabilité et à la direction future de l’entreprise.

 

La clause earn-out transforme ainsi le rôle des vendeurs en celui de partenaires stratégiques dans la transition post-acquisition, favorisant la collaboration et l’innovation. En leur offrant la possibilité de participer aux succès futurs de l’entreprise, elle les maintient investis dans sa réussite à long terme, contribuant ainsi à créer un environnement propice à la croissance et au développement continu. En somme, le paiement conditionnel se révèle être un outil puissant pour motiver les vendeurs à contribuer activement à la réussite de l’entreprise après la cession.

 


 

Cas 6 : Minimiser les aléas liés à l’évaluation de l’entreprise

 

L’évaluation d’une entreprise dans le cadre d’une transaction d’achat peut être une tâche complexe et risquée. L’acheteur cherche à déterminer la juste valeur de l’entreprise cible. Mais cette évaluation est souvent sujette à une grande variabilité en raison de divers facteurs. Ces facteurs peuvent inclure :

  • des fluctuations du marché, 
  • des tendances économiques imprévisibles, 
  • des changements dans l’industrie,
  • des incertitudes quant aux performances futures de l’entreprise. 

 

Face à cette incertitude, l’utilisation du paiement variable devient une stratégie précieuse pour minimiser les imprévus liés à l’évaluation de l’entreprise.

 

Son objectif principal dans ce contexte est de permettre à l’acheteur de partager une partie du danger lié à l’évaluation avec le vendeur. Plutôt que de verser l’intégralité du prix d’achat upfront, les partis conviennent d’un paiement variable. Les modalités de calcul peuvent être définies mutuellement à l’avance de la cession. 

 

L’acheteur peut alors réduire son exposition aux aléas associés à une évaluation incertaine. Il conserve ainsi une marge de sécurité en cas de résultats inférieurs aux attentes. La partie restante du paiement étant liée aux performances réelles de l’entreprise après la vente. Cette approche incite également le vendeur à rester engagé et à travailler activement pour les maximiser durant cette période.

 

Cependant, il est essentiel que les termes de la clause earn-out soient clairs et objectifs. Cela évite les conflits potentiels entre l’acheteur et le vendeur. Les critères de performance doivent donc être mesurables et équitables dans le contrat de cession. Malgré ces défis, l’utilisation de cette clause peut fournir une solution efficace pour atténuer les imprévus d’évaluation d’entreprise.

 

 

Cas 7 : Gérer les risques liés à l’intégration post-acquisition

 

La gestion des aléas liés à l’intégration post-acquisition est un cas d’utilisation important d’une clause earn-out. Elle offre à la fois une incitation supplémentaire au vendeur et une protection à l’acheteur.

 

Lorsqu’une entreprise est acquise, l’intégration réussie de celle-ci dans la structure de l’acheteur est essentielle pour réaliser les synergies et maximiser la valeur de la transaction. Cependant, cette intégration peut être complexe et comporter des imprévus liés à :

  • la compatibilité des cultures d’entreprise, 
  • la gestion des employés,
  • l’alignement des processus opérationnels.

 

Se servir d’une clause earn-out comme mécanisme pour atténuer ces aléas devient judicieux. L’acheteur et le vendeur peuvent s’accorder sur les modalités de calcul du paiement. Ils peuvent convenir qu’une partie du prix d’achat sera différé. Cette dernière serait liée à la réalisation de certaines étapes clés d’intégration, telles que :

  • l’harmonisation des systèmes informatiques, 
  • la consolidation des équipes,
  • l’atteinte d’objectifs de croissance spécifiques après la fusion.

 

En appliquant ce dispositif, l’acheteur peut fournir une incitation supplémentaire au vendeur pour coopérer activement à la transition. Il s’assure en même temps que l’entreprise acquise s’intègre de manière harmonieuse et efficace. L’acheteur limite en même temps ses pertes financières en cas d’échec de l’intégration.

 

En conclusion, il convient de souligner l’importance à apporter à la négociation et à la rédaction d’une clause d’earn out.

 

Il est préférable de négocier une telle clause dès les premières étapes des pourparlers entre le cédant et le cessionnaire. Ils intègrent ainsi le fait qu’une partie du prix est variable et payable à terme. Cette démarche précoce permet aux deux parties de comprendre et d’accepter que la valeur de l’entreprise ne se limite pas au chiffre initial convenu. De plus, cette prévoyance facilite la définition des conditions d’accompagnement du vendeur pendant la période earn-out. La transition en devient que plus fluide et efficace. 

 

Cependant il convient de reconnaître que ces clauses peuvent être source de contentieux. La rédaction précise de la disposition de rémunération variable est donc cruciale. Cela évite toute ambiguïté ou malentendu entre les parties. En effet, le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation et d’interprétation en cas de litige. Il est en mesure de l’annuler s’il estime indéterminée ou indéterminable. De plus, une mauvaise compréhension de la clause peut aussi dégrader leur relation. L’accompagnement du vendeur dans des conditions optimales serait compromis. 

 

Pour cette raison, il est fortement recommandé de solliciter l’expertise de conseils juridiques spécialisés dans la rédaction de ce dispositif. Ils aideraient à élaborer un langage clair, équitable et équilibré. Le contenu du contrat de cession doit refléter les intentions des parties de manière précise. En veillant à une compréhension mutuelle des termes de la clause, les parties réduisent les risques de litiges. Par conséquent, elles assurent une transition harmonieuse après le transfert de l’entreprise.


 

Richard GARUTTI, Avocat Associé, Spécialiste en droit des sociétés

 

Negotium Avocats

 

Association d’Avocats – AARPI – 54 rue de Rome – 75008 PARIS

Tel : 01 86 95 46 58 – Fax : 01 86 95 46 57

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